Les atouts de la thérapie familiale pour le patient, ses parents, sa fratrie. Un lieu d’échange privilégié avec le soignant. Le Dr Patrick Chaltiel explique.
Le groupe parole famille
Alors, « famille », ça veut dire quoi ? Ça veut dire des parents, essentiellement, des frères et sœurs aussi, et parfois des patients qui sont invités autour d’une situation particulière ou parce que la famille, le patient a une curiosité à l’égard de ce que racontent leurs parents ou leurs frères et sœurs dans ces groupes.
Alors, il y a trois aspects dans ces groupes. Il y a un aspect pédagogique, parce qu’il faut informer les familles, on ne peut pas laisser la famille dans la méconnaissance totale de ce qu’on sait des troubles mentaux, on doit énoncer clairement, de façon loyale, avec la famille, qu’il y a des choses qu’on sait, et qu’il y a des choses qu’on sait faire, et puis qu’il y a des choses qu’on ne connaît pas. En particulier, quelle est l’origine de ces maladies, c’est une chose qui reste encore très nébuleuse. Pourquoi ça tombe sur tel individu plutôt que sur tel autre ? Donc tout ça nécessite un apport d’informations. C’est le premier aspect du groupe famille.
Le deuxième aspect c’est – progressivement on voit les familles se responsabiliser, prendre plus d’assurance, et à l’inverse apporter une connaissance aux psychiatres sur la vie quotidienne des malades. C’est-à-dire qu’au début, l’aspect pédagogique est un peu hiérarchisé : c’est le psychiatre qui communique des informations à la famille ; dans un second temps ça va être le mouvement inverse : c’est-à-dire la famille va apprendre au psychiatre à travailler mieux, à comprendre comment vit le patient, à comprendre quelles sont ses difficultés. Donc c’est un échange qui devient de plus en plus mutuel, la troisième dimension étant la dimension thérapeutique.
La famille souffre et va souvent déclencher des pathologies secondaires : des dépressions, des ruptures, des éloignements, voire même chez certains, en particulier dans la fratrie, des impératifs normatifs, qui font que les frères et sœurs ne vont pas oser eux-mêmes faire part de leur souffrance parce qu’il y a déjà quelqu’un qui est tellement problématique dans la famille qu’il faut absolument être normal.
La famille en période de crise
Alors la famille a un rôle essentiel en période de crise, parce que finalement c’est la famille qui va permettre ou non de procéder à un soin dans la confiance plutôt que dans le non-consentement et dans la contrainte. Si la famille a développé des relations de qualité avec le patient, elle va pouvoir amener le patient en soins. Si la famille n’a pas de contact avec l’équipe soignante, elle va plutôt résister aux soins, elle va plutôt avoir une crainte de l’hospitalisation ou du soin psychiatrique.
La thérapie familiale
A mon avis, dans la psychiatrie, il faut une double formation : une formation à la thérapie individuelle, et une formation à la thérapie groupale, et en particulier familiale, parce que le problème de la folie n’est pas celui de la maladie mentale. La folie appartient à l’humanité en général – on a tous des moments de folie, on peut tous avoir des moments, y compris de maladie psychique. La maladie mentale chronique, par contre, n’est pas synonyme de folie. Souvent on voit dans un groupe en souffrance, la folie émerge à plusieurs endroits. Parfois même, c’est un des parents qui va plus mal que le patient. Ou un frère ou une sœur, qui décompense. Donc, la thérapie familiale permet d’éviter l’enfermement du patient dans son rôle de fou, l’identification du patient à sa maladie.