La remédiation cognitive est une intervention thérapeutique psychosociale qui a pour but de traiter les troubles cognitifs. Cette technique est spécifiquement conçue pour un usage thérapeutique visant à restaurer, renforcer, compenser les capacités cognitives altérées, et de manière indirecte, contribuer à améliorer l’autonomie des patients et leur fonctionnement socio-professionnel.
Deux approches sont habituellement utilisées : restauratrice et compensatoire.
⇒ L'approche restauratrice consiste à entrainer les fonctions cognitives déficitaires par le biais d’exercices, afin d’augmenter le recrutement des ressources cognitives nécessaires permettant ainsi l’amélioration ou le rétablissement des fonctions cognitives altérées. Elle peut être également dénommée stimulation cérébrale. Les patients cérébro-lésés ont été les premiers à bénéficier de ce type d’approche, qui par la suite s’est étendu à d’autres pathologies.
⇒ L’approche compensatoire, quant à elle, cherche à adapter l’environnement aux difficultés du patient en vue de diminuer le coût cognitif de certaines activités grâce à l’utilisation d’aides externes comme un agenda, un calendrier, un pilulier etc. Cette approche propose également l’acquisition de nouvelles stratégies cognitives pour pallier aux fonctions cognitives déficitaires dans le but de traiter les informations et de réaliser des tâches de manière optimale tout en diminuant la charge cognitive. La remédiation cognitive postule également qu’il est fondamental de considérer les capacités cognitives préservées de la personne comme soubassements sur lesquelles le patient s’appuie pour améliorer ses capacités cognitives.
Cette thérapie s’intéresse également à l’amélioration du fonctionnement du patient au quotidien et cherche à agir indirectement sur les troubles fonctionnels (Wykes et Spaulding, 2011 ; Cicerone et al., 2011). On parle de transfert de compétence, autrement dit, lorsque les compétences acquises en séance de remédiation cognitive sont utilisées dans d’autres situations de la vie courante. Pour ce faire, des tâches à domicile, en lien avec les difficultés du patient, peuvent être proposées, ou encore des exercices dits « écologique » lors des séances, c’est-à-dire qui partagent des caractéristiques avec les situations de la vie courante. Plus un apprentissage s’effectue dans un contexte écologique, plus son transfert dans la vie courante tend à être facilité. Un autre moyen de favoriser le transfert est la proposition de multiples exercices faisant utiliser la même technique mais sur des supports différents, afin d’encourager les apprenants à réfléchir sur le potentiel de transfert dans la vie quotidienne faisant intervenir ici des processus métacognitifs.
Au fil du temps, le champ de la remédiation cognitive a vu apparaître la création de programmes validés scientifiquement et adaptés à certains troubles cognitifs ou pathologies, où les différentes approches se mélangent dans une vision intégrative.
Les programmes de remédiation cognitive sont en général d’une durée de trois mois. Il s’agit un investissement pour le patient autant que pour l'équipe soignante. Cet investissement devient supérieur aux résultats lorsque la remédiation cognitive est un moyen pour que le patient acquière un meilleur fonctionnement au quotidien.
Cibles et bénéfices de la remédiation cognitive
La remédiation cognitive permet de traiter des troubles cognitifs, comme par exemple les problèmes de mémoire, de concentration, de raisonnement et bien d’autres. Ces troubles cognitifs ne peuvent pas être traités par les traitements pharmacologiques, et sont une symptomatologie commune à un bon nombre de pathologies. Des articles et méta-analyses ont montré l’efficacité de la remédiation cognitive principalement auprès des patients cérébro-lésés (Cicerone et al., 2011 ; Zucchella et al., 2014) et des patients schizophrènes (McGurk et al., 2007, Schenin-King et al., 2016). D’autres articles ont montré l’intérêt de la remédiation cognitive auprès d’individus atteints de diverses pathologies tels que les patients épileptiques ayant subi une exérèse du foyer épileptogène (Mazur-Mosiewicz et al., 2015), de patients atteints d’anorexie mentale (Tchanturia et al., 2014), de troubles bipolaires (Isaac et al. 2014), de troubles déficitaires de l'attention avec hyperactivité (O’connell et al., 2006). Les bénéfices de la thérapie vont être observés d’un point de vue cognitif (amélioration des capacités cognitives observée au moyen de tests neuropsychologiques standardisés), mais également au niveau clinique (observation au moyen d’échelles standardisées de qualité de vie et d’estime de soi, discours du patient sur sa confiance en lui et ses capacités). Les bénéfices vont s’exprimer également au niveau du fonctionnement au quotidien du patient, avec le transfert des compétences travaillées lors de la thérapie, permettant aux patients de reprendre les études ou un travail, de vivre de manière autonome ou encore de reprendre des activités quotidiennes telles que la lecture, les tâches domestiques ou une activité sportive ou artistique.
Ainsi, le temps est venu d'inclure la thérapie de remédiation cognitive dans l’arsenal thérapeutique en psychiatrie comme standard de prise en charge dans les soins courants proposée aux patients ayant une pathologie mentale.
Références
Wykes, T., & Spaulding, W. D. (2011). Thinking about the future cognitive remediation therapy-what works and could we do better?. Schizophrenia Bulletin, 37(suppl 2), S80-S90.
Cicerone, K. D., Langenbahn, D. M., Braden, C., Malec, J. F., Kalmar, K., Fraas, M., ... & Azulay, J. (2011). Evidence-based cognitive rehabilitation: updated review of the literature from 2003 through 2008. Archives of physical medicine and rehabilitation, 92(4), 519-530.
McGurk, S. R., Twamley, E. W., Sitzer, D. I., McHugo, G. J., & Mueser, K. T. (2007). A meta-analysis of cognitive remediation in schizophrenia. American Journal of Psychiatry.
Mazur‐Mosiewicz, A., Carlson, H. L., Hartwick, C., Dykeman, J., Lenders, T., Brooks, B. L., & Wiebe, S. (2015). Effectiveness of cognitive rehabilitation following epilepsy surgery: current state of knowledge. Epilepsia, 56(5), 735-744.
Tchanturia, K., Lounes, N., & Holttum, S. (2014). Cognitive remediation in anorexia nervosa and related conditions: a systematic review. European Eating Disorders Review, 22(6), 454-462.
Isaac, C., Faivre, A., Braha-Zeitoun, S., Bouaziz, N., & Januel, D. (2014). Intérêt, spécificités et bénéfices d’un programme de remédiation cognitive pour les patients bipolaires. European Psychiatry, 29(8), 650-651.
O'connell, R. G., Bellgrove, M. A., Dockree, P. M., & Robertson, I. H. (2006). Cognitive remediation in ADHD: effects of periodic non-contingent alerts on sustained attention to response. Neuropsychological rehabilitation, 16(6), 653-665.
Schenin-King, P., Thomas, F., Braha-Zeitoun, S., Bouaziz, N., & Januel, D. (2016). Cognitive remediation and nursing care. Soins. Psychiatrie, 37(306), 42.
Zucchella, C., Capone, A., Codella, V., Vecchione, C., Buccino, G., Sandrini, G., ... & Bartolo, M. (2014). Assessing and restoring cognitive functions early after stroke. Functional neurology, 29(4), 255.
Dr Dominique Januel
Responsable médical de l'URC
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